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Guillaume Durand, président de Philosophia
lundi 1er mars 2010
La philosophie n’est pas l’apanage d’austères barbus dissertant un discours inintelligible. C’est une pratique essentielle de la vie, et qui doit à ce titre être accessible à tout un chacun. Telle est la démarche de Guillaume Durand, président de Philosophia, une association nantaise qui organise du 5 au 7 mars les Rencontres de Sophie. Tout le monde est invité au débat, sur le thème Les Autres plutôt d’actualité dans nos démocraties modernes. Nantes.Evous est donc allé à la rencontre d’un autre : Guillaume Durand.
Vous êtes né à Paris, mais comment êtes-vous arrivé à Nantes ?
C’est la mer qui m’a rapproché ! Mon père aimait le bateau. Alors on a quitté Paris pour se rapprocher de la mer, du bateau.
Pourquoi cet attrait pour la philo ?
J’ai fait un bac scientifique. Mais je me suis aperçu que la philo était la matière que j’aimais le plus travailler. C’était pour moi une chose que je ne peinais pas à faire, où je n’avais pas le sentiment de faire des efforts pour m’y mettre.
Il y a quelques années, il y avait un vrai engouement pour les cafés philo. Aujourd’hui, cela perdure un peu à Nantes avec par exemple les lundi philo au Piano’cktail. Vous fréquentez ce genre d’endroits ?
Je suis allé aux Lundi philo il y a quelques années. Mais je n’y vais plus beaucoup, car j’interviens beaucoup dans des colloques, des conférences, je n’ai plus vraiment le temps avec l’Université populaire, les rencontres de Sophie, tout ce que l’on propose avec Philosophia.
Vous fréquentez quand même les cafés ? Il y a peut-être une adresse, un bar favori qui devrait attirer notre attention ?
Un bar favori... Oui, on se rejoint souvent avec les amis au Provence, près de Graslin. C’est un lieu de rencontre littéraire et amical. Il y a aussi le Molière.
Dans le même ordre d’idée, vous avez un restaurant à conseiller ?
Les Enfants terribles, près des Beaux-Arts.
Puisqu’on parle de Nantes et de philosophie, y’a-t-il des Nantais philosophes connus ?
Oui, on peut citer par exemple Denis Moreau, qui est prof à l’université de Nantes. Il est spécialiste de la philosophie de la religion, et de Descartes. Cela à un niveau national et international. Il y a aussi Michel Malherbe, spécialiste de David Hume. Sans oublier Jacques Ricot, qui travaille sur l’éthique médicale, et qui est beaucoup intervenu dans les débats publics sur ce point.
Y’a-t-il une école nantaise ? Ou tout du moins des courants particulièrement présents dans notre ville ?
Oui, la philosophie anglo-saxonne est assez présente, c’est vrai. Je me suis moi-même inscrit dans cette tradition en m’intéressant à cette philosophie analytique (ndlr : G. Durand a soutenu sa thèse sur les travaux du philosophe britannique Alfred North Whitehead). Mais il n’y a pas que ça, par exemple Ricot n’est pas de ce courant.
Comment tout ce petit monde a-t-il donné naissance à l’association Philosophia ?
Philosophia est née du désir de rendre accessible la philosophie au grand public. Il y a les Rencontres de Sophie, l’Université populaire de Nantes. Nous avons aussi organisé des choses en prison. Avec l’opéra, aussi. Celui-ci faisait des représentations du Concile d’Amour, une œuvre d’Oscar Panizza, où le pape se livrait à des orgies. L’opéra nous avait demandé d’organiser une dispute sur le thème de la beauté du mal. Le but de l’association est donc de rendre accessible la philosophie, mais tout en conservant une rigueur scientifique et universitaire.
Les Rencontres de Sophie ont dix ans cette année... Vous ne les fêtez pas particulièrement. Mais quel point de vue portez-vous sur ces dix dernières années ?
On a vu évoluer la manifestation. Au début on avait 1 000 personnes, aujourd’hui on doit être à 4 à 5 000. La programmation s’est vraiment diversifiée. Et si on ne fête pas les dix ans, c’est qu’en fait on travaille déjà beaucoup sur la onzième édition. C’est plus important...
Quel type de public accueillez-vous aux Rencontres de Sophie ?
Il y a vraiment de tout. Avec les goûters philo pour les enfants dès 7 ans, on mobilise autant les enfants, les étudiants les adultes ou les seniors. Le but est de s’adresser à toutes les classes sociales.
Cette année, le thème des Rencontres, c’est les Autres. En 2008, c’était les Images. Comment décide-t-on d’un thème ?
On en avait envie depuis longtemps. Et puis l’actualité nous a motivés, toute cette question autour de l’identité nationale, autour de l’éthique du don du vivant, de la burqa. On voulait faire ça depuis longtemps.
Quel sera le temps fort de cette édition 2010, qui se déroule au Lieu Unique, votre partenaire, du 5 au 7 mars ?
Seulement un ? Bon, parlons de Michela Marzano, qui parlera le dimanche de la peur de l’autre. Michela Marzano est quelqu’un de très claire, accessible et rigoureuse. Il y a aussi la conférence inaugurale, le vendredi après-midi. Cela portera sur les Autres, dans la démocratie. Et le samedi soir, séance de ciné-philo sur le désir, l’objet du désir. C’est avec Ollivier Pourriol, il entremêle le cinéma et la philosophie sous la forme d’une conférence mêlée d’extraits. Sans oublier l’abécédaire. Sur deux jours, le samedi et le dimanche, on fait les vingt-six lettres de l’alphabet en parlant de philosophie, sans interruption. Ça vaut le coup ! Je ferai L comme lancer de nains. Cela renvoie à la dignité humaine, puisqu’un arrêt du Conseil d’Etat l’avait interdit sur ce prétexte. J’en parlerai dans ses fondements juridiques et philosophiques.